dimanche 8 mars 2009

Elsa au miroir / Africa au miroir



L. Aragon : Elsa au miroir


C’était au beau milieu de notre tragédie

Et pendant un long jour assise à son miroir

Elle peignait ses cheveux d’or je croyais voir

Ses patientes mains calmer un incendie

C’était au beau milieu de notre tragédie

Et pendant un long jour assise à son miroir

Elle peignait ses cheveux d’or et j’aurais dit

C’était au beau milieu de notre tragédie

Qu’elle jouait un air de harpe sans y croire

Pendant tout ce long jour assise à son miroir

Elle peignait ses cheveux d’or et j’aurais dit

Qu’elle martyrisait à plaisir sa mémoire

Pendant tout ce long jour assise à son miroir

A ranimer les fleurs sans fin de l’incendie

Sans dire ce qu’une autre à sa place aurait dit

Elle martyrisait à plaisir sa mémoire

C’était au beau milieu de notre tragédie

Le monde ressemblait à ce miroir maudit

Le peigne partageait les feux de cette moire

Et ces feux éclairaient des coins de ma mémoire

C’était au beau milieu de notre tragédie

Comme dans la semaine est assis le jeudi

Et pendant un long jour assise à sa mémoire

Elle voyait au loin mourir dans son miroir

Un à un les acteurs de notre tragédie

Et qui sont les meilleurs de ce monde maudit

Et vous savez leurs noms sans que je les aie dits

Et ce que signifient les flammes des longs soirs

Et ses cheveux dorés quand elle vient s’asseoir

Et peigner sans rien dire un reflet d’incendie


Palimpseste : Africa au miroir de Bacon

Elle était belle, elle était folle

ses yeux plaintifs de bête traquée

de peur et d'envie hésitaient,

devant les toiles du mariolle.

Elle était belle, elle était folle

étoile filante, désespérée

ses beaux cheveux en ondulaient,

Elle était belle, elle était folle

tant la souffrance, elle la vivait.

Les larmes sur ses joues roulaient

qu'un large sourire en bémol

pourtant de lumière coloriait.

Un vif espoir l'illuminait...

A la torture de tous les viols,

de ces peintures au vitriol

Elle, bête sauvage, se réveillait.

Elle était belle, elle était folle

d'Amour la fleur, à meurtrière corolle

au fumier des toiles éjaculées

d'un sodomite reclus givré.

Elle était belle, elle était folle

Elle est dragon tenu en licol,

ses yeux de braise fulminaient

rien, plus rien ne la retiendrait

Ni l'inquisiteur espagnol,

ni les rêts de la camisole

d'une vie creuse sans boussole,

Car une rageuse liberté

court en elle et désormais

couvre ses baisers aux idoles.

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